Vathek
William Beckford
éditions Corti
1786
Oui, je sais, ça fait bien longtemps. J'ai eu beaucoup de travail ces derniers temps. Mais comme je ne suis pas cruelle, je vous offre quand même une note avant le 24 décembre. Ne me remerciez pas, c'est tout naturel. Je sais que vous désiriez de toutes vos forces avoir une critique d'un roman obscur du 18e siècle.
Vathek est un livre qui a la particularité d'avoir été écrit en français par un auteur anglais et dont l'action se déroule au Moyen-Orient. Il met en scène le personnage éponyme, Vathek, un puissant sultan qui, avide de pouvoir, se laisse corrompre par un faux dieu et , enchaînant atrocités et actes vils, se retrouve en Enfer. Là, il fait la connaissance d'autres infortunés qui, dans l'attente de leurs jugements tout comme lui, lui font tour à tour le récit de leurs vies et de leurs fautes...
Il y a beaucoup des 1001 nuits dans ce récit qui se présente au niveau du style comme un conte oriental (touche exotique, éléments merveilleux, morale finale) avec cependant un côté gothique qui ressort tout particulièrement lors des scènes "infernales" ou dans certaines descriptions. Vathek est également considéré comme un classique de la littérature romantique noire: passions exacerbés, morts violentes, amants maudits... D'un point de vue littéraire, c'est une mine d'or. En revanche le style est un peu lassant; l'univers du conte est assez particulier en soi et l'histoire principale, celle de Vathek, est beaucoup trop longue pour ne pas susciter sur la fin un léger ennui, d'autant plus que les éditions Corti alourdissent le texte par un appareil critique qui gâche le plaisir de la lecture. Les histoires imbriquées dans celle du héros sont beaucoup plus intéressantes: plus courtes, elles sont de ce fait plus marquantes. L'ensemble évoque un bric-à-brac mal ficelé: le rythme du récit est parfois cassé, certaines histoires sont expédiées tandis que d'autres sont plus longues que celles de Vathek, et la fin même du roman est plutôt abrupt. Vous l'avez compris: Vathek est plus une curiosité littéraire qu'autre chose, un livre dans lequel il est difficile de rentrer mais qui par la suite se lit plutôt bien. Ce qui me frappe surtout dans ce roman, c'est l'absence de l'auteur: Beckford s'efface complètement derrière son texte. C'est un sentiment assez curieux...
Sur ces bonnes paroles, je vous souhaite à tous un très joyeux Noël et à bientôt!