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13 août 2017 7 13 /08 /août /2017 13:43

Bleak House

Charles Dickens

éditions de l'Archipel

1853

 

Je sais ça fait longtemps. Mais bon en même temps c'est l'été, vous avez sûrement autre chose à faire qu'à passer votre temps devant un écran d'ordinateur non? Pour ma part j'ai été à la campagne. C'est joli la campagne et on peut y lire tranquillement. Des conditions idéales pour avancer dans les 1001 Livres... d'autant plus que l'ouvrage dont nous allons parler aujourd'hui était également idéal pour la sieste.

Vous l'avez sûrement remarqué à présent, mon 1001 livres... adore Dickens. C'est déjà le troisième qu'il me propose comme oeuvre incontournable et j'ai vu avec horreur qu'un quatrième arrive par la suite. Tout le monde semble aimer Dickens et s'extasier devant cet auteur. Oserai-je l'avouer ? Pour ma part je le trouve soporifique.

Bleak House démarre à Londres sur une sombre histoire de procès, l'affaire Jarndyce, qui dure depuis des générations et dont les tenants et les aboutissants sont si complexes que le tout ça n'est plus devenu qu'un sujet de plaisanterie au sein même de la Chancellerie. Le plaignant, Tom Jarndyce, a fini par se suicider et son fils John a préféré se retirer dans sa maison de Bleak House, laissant à son avocat le soin de gérer une procédure dont il ne se soucie guère du résultat. Cependant, c'est un philanthrope au coeur tendre qui décide de recueillir ses jeunes cousins, Ada et Richard, liés également à l'affaire. Pour leur tenir compagnie il leur adjoint Esther, une jeune orpheline dont les origines restent obscures. Est-ce lié à la belle et mystérieuse Honoria Dedlock qui semble s'ennuyer ferme dans son manoir du Lincolnshire ?

Deux volumes de 600 pages chacun : c'était long, très long. La grande réussite de Bleak House c'est incontestablement la critique féroce de l'appareil judiciaire de l'époque où la moindre vétille devient prétexte à une procédure interminable. Avocats tatillons, hommes de lois douteux, escrocs en tout genre se côtoient à la Haute Cour de la Chancellerie, affairés à ne rien faire, se mêlant à des plaignants qui sont devenus fous à force d'attendre un jugement qui n'est jamais venu. A cette ironie mordante d'une société sclérosée par la paperasse et l'administration, Dickens ajoute une intrigue policière : que cherche à cacher lady Dreadlock et qui sont les parents de la jeune Esther ? Bon, autant vous dire que le suspens n'est pas non plus à couper le souffle mais cette intrigue nous permet de faire connaissance avec une multitude de personnages. Certains sont plutôt réussis : John Jarndyce, le bourru au grand coeur, Richard, le gentil indolent qui se laisse peu à peu pervertir, lady Dreadlock dont la froideur masque un caractère passionné et une souffrance secrète, Miss Flite qui hante la Chancellerie, déterminée à ne libérer ses oiseaux que lorsque son propre procès aura été résolu... En revanche, et c'est là où le bât blesse, impossible pour moi de trouver de l'intérêt à l'héroïne, Esther, narratrice durant la moitié du roman. Comme dans David Copperfield, l'auteur nous pond un personnage féminin d'une fadeur navrante, un ange de douceur, de compassion et de piété qui ne se rebelle jamais, parfaite maîtresse de maison, éducatrice modèle... Pas la moindre trace de passion ou d'interrogations dans cet être qui se soumet d'abord à sa tante puis à son tuteur sans jamais chercher à se poser de questions. Dickens nous l'oppose à l'intraitable Mrs Jellyby, une femme qui se passionne pour la cause humanitaire en Afrique et qui de ce fait, néglige complètement son foyer, oh scandale ! La "morale" est sans appel : femme, occupez-vous de vos maris et de vos enfants, votre place est à la maison. La soumission d'Esther est telle qu'est ira jusqu'à s'interdire d'aimer sans la permission de John Jarndyce. Alors certes, nous sommes au 19e siècle, certes il faut replacer le roman dans son contexte, mais je ne peux m'empêcher de noter que des héroïnes comme celles de Jane Austen ont bien plus de caractère que les mièvres poupées de Dickens (on n'évoquera même pas Ada qui est si transparente qu'on finit par l'occulter totalement). En tous cas, pour ma part, ce personnage d'Esther a considérablement refroidi mon intérêt pour un roman qui par ailleurs est bien trop long, la faute à sa forme initiale de roman-feuilleton, et qui s'essaie parfois à un humour que je trouve parfois raté. Tout n'est pas à jeter, certains passages sont très émouvant ou très drôles mais Bleak House restera à mon sens un ouvrage mineur de Dickens que j'ai été heureuse de terminer.

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8 juillet 2017 6 08 /07 /juillet /2017 11:16

Cranford

Elizabeth Gaskell

éditions Points

1852

 

A Cranford, il n'y a quasiment que des dames, veuves ou vieilles filles. Les hommes meurent ou ne restent presque jamais longtemps dans cette ville moribonde, leur préférant la dynamique Drumble accessible par le chemin de fer. Aussi nos habitantes ont-elles appris depuis longtemps à se débrouiller seules : elles mènent une vie tranquille et routinière en bonne intelligence avec leurs voisines, ponctuée de quelques querelles vite oubliées et, pour ne pas embarrasser, feignent de ne pas s'apercevoir de la pauvreté de leurs amies...

Narré à la première personne par une héroïne qui ne vit pas elle-même dans la ville mais qui y fait de longs et fréquents séjours, Cranford est un récit terriblement touchant. A vue de nez, cela peut paraître un peu ennuyeux : il n'y a pas à proprement parler d'intrigue, le roman est plus une suite de saynètes et de situations racontant le quotidien de ces femmes, et un quotidien qui est loin d'être palpitant : une vieille fille qui retrouve sur le tard un amour d'enfance, un magicien qui arrive en ville, une succession de vols réels ou supposés qui déclenchent une panique collective, un dîner mondain chez la "noble" du coin... Nos héroïnes obéissent à une succession de codes et de protocoles,  bavardent et disent beaucoup de bêtises, sont superstitieuses et un peu trouillardes. Mais tous ces défauts les rendent humaines et elles n'en sont que plus touchantes dans leurs petites manies. De plus, il y a quelque chose d'infiniment héroïque dans ces femmes livrées à elles-mêmes et qui mènent de front leur vie, feignant de n'être ni pauvres ni seules. Ainsi, l'ouvrage nous livre bon nombre de passages émouvants comme miss Matty lisant de vieilles lettres ou se privant de tissu pour venir en aide à un homme qui a fait faillite à cause de la banque dont elle possède elle-même des actions, ou ses amies qui lui viennent secrètement en aide quand elle perd tout. L'écriture de Gaskell se rapproche beaucoup de celle d'Austen : c'est un peu le même univers et le style est très proche. L'humour est omniprésent et, si la moquerie perce parfois, c'est une moquerie pleine de tendresse pour des personnages qui avec tous leurs travers et leurs considérations futiles parviennent néanmoins à acquérir une véritable dimension romanesque.

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5 juillet 2017 3 05 /07 /juillet /2017 13:23

La case de l'oncle Tom

Harriet Beecher-Stowe

éditions Livre de Poche

1852

 

Encore un classique de la littérature que, à ma grande honte, je n'avais jamais lu. Dieu sait pourtant que c'est un incontournable du roman américain mais ça y est l'oubli est réparé ! Aujourd'hui je vais vous parler de La case de l'oncle Tom. Asseyez-vous tous en rond et préparez vos mouchoirs.

Tom est un esclave noir  plutôt heureux puisqu'il est sous les ordres de monsieur Shelby, un gentilhomme du Kentucky qui le traite convenablement. Il vit avec sa femme et ses enfants dans une case et sa grande piété ainsi que sa gentillesse lui vaut le respect non seulement de ses pairs mais aussi de ses maîtres. Malheureusement, monsieur Shelby a fait de mauvaises affaires et se voit contraint, sous peine de faire faillite, de vendre Tom ainsi que l'enfant de la femme de chambre, Henri, âgé d'à peine cinq ans. Alors que Tom se résigne à son triste sort et s'apprête à suivre le marchand d'esclaves dans le Sud, Elisa la femme de chambre, refusant de se faire enlever son fils, décide de s'enfuir avec ce dernier en direction du Canada.

On ne va pas se mentir : La case de l'oncle Tom est souvent un peu gnangnan. Tom est bien gentil mais il est insupportable de résignation et de bondieuserie, citant la Bible à tout bout de champs et se refusant à la moindre révolte. Ce n'est pas pour rien si des années plus tard son personnage est toujours aussi controversé, certains voyant en lui l'archétype du Noir servile et obséquieux. Ce serait cependant mal interpréter la pensée de l'auteur qui prend dans ce livre une position claire et nette contre l'esclavage. Outre qu'elle met en scène des esclaves prêts à tout pour reconquérir leur liberté et qu'elle dénonce les pratiques révoltantes liées à la marchandisation de l'être humain : séparation des familles, prostitution des jeunes filles, conditions épouvantables de travail... elle s'indigne tout particulièrement contre les membres du clergé qui tentent de justifier l'esclavage par une lecture erronée de la Bible. Il ne s'agit pas pour autant d'un roman manichéen : Harriet Beecher-Stowe n'oppose pas les bons esclaves et les méchants maîtres. A dire vrai, dans le roman, les maîtres mauvais sont assez rares ; la plupart sont plutôt bienveillants ou tout du moins ne traitent pas forcément mal leurs esclaves. Le problème pour l'auteur ne réside pas là : il ne s'agit pas de stigmatiser des attitudes mais une pratique générale qui permet à un homme d'être le propriétaire d'un autre homme, aussi bon cet homme soit-il. Vous auriez beau être la meilleure personne au monde, rien ne vous autorise à disposer d'autrui. A partir de là, il faudrait plutôt voir en Tom une figure christique, un homme bon et vertueux dont le sacrifice permet la libération d'un peuple tout entier. La case de l'oncle Tom est aussi un récit d'aventures et d'action, grouillant de péripéties et de bons sentiments un peu trop sucrés il faut parfois l'avouer, mais qui se lit rapidement et avec un réel plaisir et une réelle attente. Ecrit juste avant la guerre de Sécession, il aura eu également le mérite de servir la cause abolitionniste.

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28 juin 2017 3 28 /06 /juin /2017 13:04

Movers

Les Passeurs d'Ombres

Meaghan McIsaac

éditions Auzou

2016

 

L'inconvénient des services de presse, c'est que ça s'entasse insensiblement et que des livres se rajoutent semaine après semaine à une pile déjà bien garnie. Résultat : certains services de presse se font noyer, disparaissant sous une couche de romans plus récents, eux-mêmes condamnés à disparaître sous une autre couche. Parfois, ce n'est pas bien grave, d'autres fois c'est plus dommage. Ainsi, je viens seulement de mettre le nez dans Movers, un livre fantastique pour la jeunesse sorti il y a maintenant plus de six mois. Trop tard pour le mettre en avant sur une table et, pourtant, pour le coup, il l'aurait mérité.

Nous sommes à la fin du millénaire et les dirigeants sont un peu sur les dents depuis la découverte des Passeurs, un groupe de personnes capable de faire passer des habitants du Futur (nommés les Ombres) au Présent, aggravant encore une surpopulation déjà critique. Ainsi, depuis 2077, tout Passage est formellement interdit. Pat et sa soeur Maggie en ont fait les frais puisqu'ils ont vu leur père se faire arrêter six ans auparavant et qu'eux-mêmes sont depuis surveillés du fait de leur propre statut de Passeurs. La situation ne s'arrange pas lorsque l'instituteur de Maggie constate une augmentation des pouvoirs de cette dernière et que Pat est bien malgré lui impliqué dans un Passage d'une extrême violence.

Dystopie traitant des voyages dans le temps, Movers avait tout du sujet casse-gueule mais parvient à s'en sortir remarquablement malgré quelques petites invraisemblances inévitables. Les personnages sont attachants : l'auteur a la bonne idée de ne pas faire de son héros, Pat, le narrateur, un Passeur chevronné ou un garçon avec des supers-pouvoirs dont il ignore tout mais au contraire, d'en faire un protagoniste somme toute assez ordinaire amené par la force des choses à se cacher avant tout pour protéger ceux qu'ils aiment. Le monde futuriste créé est également plutôt réussi ; la dystopie pour une fois ne part pas sur un postulat complétement irréaliste et l'univers créé présente de ce fait de troublantes similitudes avec le nôtre. Je suis franchement déçue de n'avoir pas découvert ce livre plus tôt et encore plus déçue de ne pas voir d'annonce du tome 2 dans les mois à venir...

 

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26 juin 2017 1 26 /06 /juin /2017 14:38

La mémoire de Babel

La Passe-Miroir tome 3

Christelle Dabos

éditions Gallimard Jeunesse

2017

 

Le voilà ! Après tout ce temps j'ai enfin la suite de La Passe-Miroir entre les mains ! Pour tous ceux qui ne connaissent pas encore la saga fantastique adolescente la plus aboutie depuis longtemps, passez votre chemin (et allez vite vous acheter le premier et le deuxième tome non mais!) Les autres découvrons ensemble la suite des aventures de notre Animiste préférée.

Voilà plus de deux ans que Thorn a disparu et que Ophélie, de retour sur son arche natale, se morfond dans l'attente de ses nouvelles. Une situation qui est loin de lui convenir d'autant plus qu'elle sent le regard des Doyennes qui ne la lâchent pas. Aussi, lorsqu'elle a l'opportunité de filer en douce elle n'hésite pas une seconde. Sa prochaine destination ? L'arche de Babel, l'endroit qui conserve toutes les archives de l'origine du monde. Ophélie s'infiltre au coeur du Mémorial sous une fausse identité, bien déterminée à découvrir la vérité sur Dieu et, surtout, à retrouver Thorn parti lui-même  à la recherche de cette vérité.

Je regrette un peu de n'avoir pas pu relire les deux premiers volumes de la saga, actuellement en transit, car du coup il m'a fallu un peu de temps pour me replonger dans l'univers de la série. Heureusement, la qualité de l'écriture et des personnages est telle qu'on se remet bien vite dans le bain. Changement de décor cette fois puisque nous découvrons une nouvelle arche et un nouveau pan du monde créé par Christelle Dabos : place à Babel et à ses mystères, à ses automates et à ses archives énigmatiques. Cependant la mise en place de ce nouveau décor se fait de façon si naturelle que nous y adhérons encore une fois pleinement : c'est rare qu'un ouvrage fantastique parvienne à happer ainsi son lecteur sans le perdre dans des noms compliqués ou des personnages improbables. Encore plus rare de parvenir à rendre attachante et extraordinaire un petit bout de femme un peu dodue et pas excessivement jolie, une héroïne qui est tout sauf stéréotypée mais qui de ce fait est crédible et dont la détermination et le courage n'en deviennent que plus émouvants. J'avoue avoir été aussi assez heureuse de retrouver dans ce livre Archibald, mon petit chouchou de la saga, le temps de quelques parenthèses dans le récit. Encore un très bon moment de lecture, ne reste plus qu'à attendre la suite avec hélas un petit pincement au coeur puisqu'il s'agira du dernier tome...

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26 juin 2017 1 26 /06 /juin /2017 13:20

La séparation

Christopher Priest

éditions Folio

2002

 

Bon, comme vous le savez déjà, la science-fiction et moi c'est pas franchement ça. Disons qu'à petite dose ça va mais le plus souvent je suis vite larguée par les termes techniques et les mondes futuristes plus ou moins fantaisistes. Ceci dit, le livre dont je vais vous parler aujourd'hui est un livre de science-fiction particulier puisqu'il mêle l'uchronie au roman historique.

En 1936, Jack et Joe Sawyer, jumeaux et champions olympiques d'aviron, participent aux jeux de Berlin et font deux rencontres déterminantes : leur chemin croise celui de la jolie Birgit, une allemande juive de dix-sept ans à qui ses parents veulent faire quitter l'Allemagne au plus tôt, et Rudolf Hess, personnalité majeure du troisième Reich. Cinq ans plus tard, les deux frères se sont éloignés : Joe a épousé Birgit et est devenu un pacifiste convaincu alors que Jack a rejoint l'armée de l'air britannique. Dans la nuit du 10 au 11 mai 1941, son avion s'écrase, cette fameuse nuit où Hess se serait envolé d'Allemagne pour soi-disant négocier un traité de paix séparé avec l'Angleterre...

J'ai essayé de résumer au mieux un roman qui, à dire vrai, échappe à toute classification. Le point de départ est un événement historique vérifié, celui de l'arrestation de Hess qui aurait voulu proposer un traité de paix. A partir de là, l'auteur fait intervenir deux personnages, Jack et Joe Sawyer dont les voix se mêlent alternativement lors d'une narration disloquée et tout sauf linéaire, et d'un historien, Stuart Gratton, qui tente de démêler l'écheveau emmêlé à partir de témoignages parfois contradictoires. L'uchronie est si légère et si habile qu'on pourrait presque croire à un "vrai" ouvrage historique si les faits soudain ne paraissaient pas comme déformés. Il s'agit d'une légère torsion de la réalité, d'un très bon exercice de style qui plonge le lecteur dans la plus grande confusion (qu'est-ce qui est réel, qu'est-ce qui ne l'est pas) et d'un récit qui, à coup sûr n'a pas volé les prix qui lui ont été décernés...

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6 juin 2017 2 06 /06 /juin /2017 14:02

L02.jpgLa mort du temps

Aurélie Wellenstein

éditions Scrineo

2017

 

Callista n'est pas une adolescente très heureuse : en fait elle projette même de s'enfuir avec sa meilleure amie (et plus si affinités) Emma histoire d'échapper à une atmosphère familiale pesante et aux querelles perpétuelles de ses parents. Mais soudain il y a un éclair aveuglant suivi d'un séisme et la vie de la jeune fille bascule. Quand elle se réveille à l'hôpital, le monde a changé : différentes époques se sont mélangées et les survivants à l'onde de choc ont fusionné entre eux ou avec leur environnement. Callista fuit, talonnée par "Flash" une secousse mortelle qui corrige de façon définitive les anomalies spatio-temporelles. Son objectif ? Fuir Paris et retrouver Emma dans les Vosges.. En chemin elle va bientôt faire de nouvelles rencontres...

A dire vrai, au début, j'étais pas emballée. C'était pas mal écrit mais le livre avait un air de déjà-vu : apocalypse, adolescente en cavale, belles rencontres et amitiés... Vu et revu non ? Cependant, de petits détails me titillaient : dans cette histoire somme toute conventionnelle, quelque chose clochait. Un rebondissement au milieu du récit m'a confortée dans mon pressentiment. Il s'avère que le livre de Wellenstein est remarquablement construit et que tout ce qui pouvait paraître étrange s'explique après coup. L'intrigue en elle-même nous réserve son lot de surprises et rien ne se déroule comme le lecteur aurait pu le croire. C'est bien fichu, l'univers est très sombre, oppressant, et le fait que le livre ne soit pas le début d'une série lui permet du coup d'avoir un impact plus important. En bref, un très bon roman qui parvient à jouer avec le temps sans se brûler les ailes.

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31 mai 2017 3 31 /05 /mai /2017 10:59

L01.jpgDans une coque de noix

Ian McEwan

éditions Gallimard

2016

 

C'est un témoin capital : il sait qu'un meurtre va avoir lieu. Sa mère Trudy et son oncle Claude, l'amant de cette dernière, projette d'empoisonner son père John, un éditeur et poète fauché mais talentueux. Il sait quand et comment le meurtre va avoir lieu mais le problème c'est qu'il ne peut rien faire: notre héros est en effet un enfant à naître, bloqué dans le ventre de cette mère à la fois détestée et adorée. A l'étroit dans un corps dont il dépend totalement, victime consentante de l'alcool que Trudy ingurgite, oublié de tous dans les projets d'avenir, notre Hamlet miniature médite sur la vie, sur le monde dont il va bientôt faire partie et essaie en vain d'empêcher le crime qui pourrait par ricochet lui coûter cher également.

Ce roman plein d'humour nous rejoue une tragédie shakespearienne en version contemporaine. Il y a du poison et de l'amour, des histoires de famille sordides, des poèmes et un innocent assassiné. L'originalité du récit réside bien évidemment dans ce narrateur à la fois faible et tout puissant qui sait tout mais qui paradoxalement ne peut rien faire, ce bébé raisonnant comme un vieux sage et qui entretient avec sa mère une relation passionnée, oscillant entre amour et haine. Face à Trudy il y a Claude (dont le nom n'est pas sans évoquer pour le coup l'époque romaine, fertile également en poison et en trahisons) l'oncle honni, rival du père bien-aimé mais aussi du narrateur lui-même. Les personnages peu nombreux, la position insolite du héros lui-même font du roman un huis-clos troublant, drôle mais non dénué de réflexion et qui réserve son lot de péripéties jusqu'à un final, comme toute tragédie digne de ce nom, inévitable...

 

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25 mai 2017 4 25 /05 /mai /2017 10:01

L01.jpgL'île aux mensonges

Frances Hardinge

éditions Gallimard Jeunesse

2015

 

Faith a quatorze ans et se passionne pour les sciences. Elle rêve de devenir naturaliste tout comme son père, un pasteur reconnu dans ce domaine. Mais sous l'époque victorienne tout ce qu'on attend d'une jeune fille c'est qu'elle se taise et trouve un bon mari. Aussi notre héroïne ronge-t-elle son frein. Tout change le jour où le révérend se retrouve accusé d'avoir trompé la communauté scientifique et contraint de rejoindre une île isolée au large des côtes anglaises pour échapper au scandale, embarquant avec lui toute sa famille. Il ne parvient cependant pas à empêcher les ragots de parvenir jusqu'à sa nouvelle demeure et se retrouve bientôt mis au ban de toute la population. Un jour, il est retrouvé mort. Suicide, assassinat ? Faith qui idolâtrait son père décide de mener l'enquête et de jeter un oeil sur les mystérieuses recherches  qui ont vraisemblablement causé sa perte.

Ce que j'ai apprécié dans ce roman, c'est que s'il y a une réelle réflexion féministe derrière, notamment grâce à des personnages féminins forts (Faith, sa mère Myrtle, miss Hunter, Agatha Lambent) cela ne prend jamais le pas sur l'intrigue et cela ne tourne jamais à la morale pesante. L'auteur nous évite également une histoire d'amour gnangnan pour se focaliser sur la relation ambigüe qu'entretient l'héroïne avec ses parents: Faith est en admiration devant un père qui la traite au mieux avec indifférence, au pire avec mépris tandis qu'elle s'oppose à une mère en apparence frivole mais qui se révèle au fil des pages beaucoup plus complexe que ce l'on pourrait penser. Ajoutez à cela des descriptions particulièrement réussies d'une île austère, battue par les vents et la pluie, une mort mystérieuse, des accidents inexpliqués et vous obtenez un livre pour adolescents d'une grande qualité littéraire pour une fois et qui surfe avec audace sur des thèmes inhabituels tout en gardant le sens du suspens.

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23 mai 2017 2 23 /05 /mai /2017 14:56

L02.jpgLes sorcières du clan du Nord

Le sortilège de minuit

Irena Brignull

éditions Gallimard Jeunesse

2016

 

Crécerelle aime énormément sa soeur Charlock même si celle-ci est un peu simplette. Pourtant elle réagit violemment lorsqu'elle apprend que cette dernière est enceinte d'une fille. Pourquoi ? Parce que Crécerelle et Charlock sont des sorcières et qu'une prophétie a prédit que l'une des deux soeurs accoucherait d'une reine. Oui mais laquelle ? Pour protéger sa fille Surelle qu'elle veut voir à la tête du clan, Crécerelle lance un sort à la nouvelle-née et l'intervertit à la naissance avec une enfant tout ce qu'il y a de plus ordinaire, née le même jour qu'elle. Les années passent : Clarée grandit au milieu de la communauté des sorcières, malheureuse et incapable de pratiquer le moindre enchantement tandis que Poppy se fait renvoyer de tous les lycées qu'elle fréquente, rejetée par tous y compris par sa propre mère. Un jour les jeunes filles se croisent par hasard et deviennent amies...

Sans être la révélation de l'année, Le sortilège de minuit est un très bon roman ado fantastique qui revisite à sa sauce le thème des sorcières et lui apporte une touche d'originalité : on est loin des sorcières un brin sulfureuses, ici elles s'apparentent plus à des garçons manqués qui dissèquent des animaux morts ou vivants et se soucient peu des apparences au grand dam de Clarée, l'humaine qui apparait comme une marginale car elle aime se laver les cheveux. La force du livre tient cependant à ses personnages et notamment aux deux héroïnes qui s'opposent en tout mais qui deviennent néanmoins les meilleures amies du monde, unies par leur profonde solitude. L'intrigue est bien menée et ce premier tome sans réelle surprise mais pas désagréable semble de bon augure pour la suite.

 

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