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10 avril 2016 7 10 /04 /avril /2016 12:29

L02.jpgCelle que vous croyez

Camille Laurens

éditions Gallimard

2016

 

Tout commence par Claire, divorcée et presque quinquagénaire et qui, pour surveiller Joe, un amant volage, décide de se créer un faux profil Facebook. Elle se rajeunit de plus d'une vingtaine d'années et "emprunte" la photo de profil d'une belle brune mélancolique. c'est de cet alter ego fictif dont Christophe, l'ami de Joe, va tomber amoureux, embarquant bientôt Claire dans une série de mensonges compliquées par le désir qu'elle ressent elle-même pour cet homme de dix ans de moins qu'elle.

De Camille Laurens je n'avais lu que Dans ces bras-là il y a fort longtemps. Je me rappelle avoir été perturbée par le style et par la construction du roman et d'en être ressortie avec un sentiment assez mitigé. Celle que vous croyez m'a laissée la même impression. Mes réticences tiennent au style essentiellement : je n'accroche pas du tout avec l'écriture de l'auteur, précipitée, manquant de respiration, et tournée autour d'une narratrice omniprésente. Je trouve ça étouffant. J'ai également beaucoup de mal avec l'autofiction, avec l'auteur qui se met en scène sans pudeur : même si tout est inventé, que tout est faux (c'est le cas ici), l'écrivain-personnage est suffisamment crédible pour nous prendre en otage et nous "forcer" à ressentir de la sympathie. Cela m'insupporte car j'aime avoir le choix d'adhérer ou non au parti d'un personnage. Ce genre de littérature rend ça impossible, tout comme elle rend toute identification impossible : vous écoutez l'histoire d'une autre, il n'y a pas de place pour la vôtre. En revanche, la force de Camille Laurens tient dans la construction de son ouvrage. C'est un habile jeu de miroirs et de faux-semblants, d'illusions plus ou moins révélées. Nous avons d'abord le point de vue de Claire, internée dans un asile psychiatrique pour une raison que nous ignorons. Suit le bref point de vue du psychiatre de cette dernière qui fait voler en éclats les propos de sa patiente, puis le point de vue de Camille Morand, écrivain de son état, ruinant toute la véracité des témoignages précédents et, pour finir, le point de vue du mari de Claire qui apporte au roman un éclairage inédit. Au lecteur de démêler le vrai du faux dans ce labyrinthe de situations et de personnages qui l'hypnotisent littéralement. Celle que vous croyez est de plus une réflexion plus qu'intéressante sur le désir féminin : toutes les femmes de l'histoire, que ce soit Claire ou Camille, ont ce même refus d'abandonner, de renoncer à l'amour et au désir, tout en étant terrorisées par cette sentence dans l'oeil de l'homme, ce regard qui les condamne à la vieillesse et à la solitude. C'est un plaidoyer féministe qui n'a pas cependant pas le côté irritant "Girl Power" et tout le toutim (c'est d'ailleurs de mémoire ce qui m'avait déjà plu dans Dans ces bras-là. A cela s'ajoute une réflexion sur notre société actuelle, hyper-connectée mais qui n'a paradoxalement aucune transparence, où l'on peut réinventer sa vie en toute impunité, de la même façon que l'auteur réinvente la vie de son héroïne. Ainsi si Celle que vous croyez me laisse un sentiment étrange, je ne peux pas dire que je n'ai pas aimé : il s'agit en effet d'un roman étrange et en trompe-l'oeil qui mérite qu'on s'y attarde.

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8 avril 2016 5 08 /04 /avril /2016 11:57

L07.jpgYesterday's Gone

Saison 1 épisode 1 et 2

Le jour où le monde se réveilla désert

Sean Platt / David Wright

éditions Fleuve

2013

 

Quand j'étais une ado, j'avais commencé à écrire une saga fantastique pour mon grand frère : ça se présentait sous la forme d'épisodes que je faisais plus ou moins régulièrement, un peu comme une série télé. Et bien figurez-vous que les deux auteurs de Yesterday's Gone ont eu la même idée que moi : passionnés par des séries comme Lost ou X Files, ils ont décidé d'écrire leur propre roman-série. L'histoire est celle de nombreux personnages qui se réveillent dans un monde devenu quasiment désert. Leurs familles, leurs amis ont disparu, bon nombre d'animaux et de bâtiments également. Déboussolés, terrifiés, les "survivants" tentent tant bien que mal de se rassembler et de découvrir ce qu'il se passe. Comme dans une série, la narration saute d'un personnage à un autre et les auteurs vont même plus loin puisqu'ils scindent le livre en deux "épisodes" distincts.

Où est le hic me direz-vous, vous qui avez vu la tête de mon petit lapin en début d'article ? Je retourne à mon expérience personnelle : mon frère aimait beaucoup les épisodes que je lui faisais et les lisais avec plaisir, jusqu'au jour où j'ai cessé de l'approvisionner. Des années plus tard, pris de nostalgie, il les a relu à la suite et le verdict est tombé : ça n'allait pas. La faute tient à la forme : vous n'écrivez pas de la même façon une histoire d'un trait qu'un roman découpé en tranches. Yesterday's Gone a d'abord été écrit pour Internet du coup tous ses chapitres, proposés à intervalles réguliers, se devaient d'être addictifs et de donner envie d'y retourner. Mis en roman, ça ne marche plus : un roman, tout comme un morceau de musique, a besoin de respirations, de passages moins intenses et de liaisons en apparence inutiles mais pourtant nécessaire à l'harmonie de l'ouvrage. Là c'est trop lourd, trop dense, sans compter les redondances que ne verrait pas un lecteur qui lirait par petites touches mais que ne manque pas de remarquer celui qui lit tout d'un bloc. Malgré les affirmations des deux auteurs, je ne suis donc pas convaincue par cette forme littéraire soit-disant révolutionnaire, pas plus que je ne suis convaincue par leur style grossier, leurs personnages sans aucun relief et leurs descriptions supposées être terrifiantes mais qui sont tellement peu subtiles qu'elles tombent à plat. Yesterday's Gone c'est l'équivalent certes de la série télé mais de la série télé dans ce qu'elle a de plus caricatural : des vilains monstres, des hommes baraqués et mystérieux qui tiennent des flingues pendant que des jeunes femmes plus ou moins apeurées se tiennent derrière eux, et des adolescents qui vont apprendre à grandir très vite dans ce monde devenu fou et même découvrir l'amour. C'est bien les gars, continuez gentiment votre délire de geeks mais bon, ne taxez pas ça de révolution littéraire et, par pitié, prenez aussi quelques cours d'écriture.

 

PS : Rien à voir mais c'était hier l'anniversaire de ce blog qui fête ses huit ans. J'en profite pour remercier tous ceux qui viennent régulièrement ou irrégulièrement par ici et j'espère que vous prenez autant de plaisir à lire ces articles que je prends plaisir à les écrire. J'en profite du coup pour souhaiter un joyeux anniversaire à tous ceux dont c'est l'anniversaire aujourd'hui, on ne sait jamais.

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3 avril 2016 7 03 /04 /avril /2016 14:02

L02.jpgPars vite et reviens tard

Fred Vargas

éditions Magnard

2001

 

Pars vite et reviens tard est sans doute l'un des ouvrages les plus connus de Fred Vargas. C'est curieusement l'un de ceux que j'ai le moins aimé à l'époque. Bien des années plus tard, une seconde lecture s'imposait.

A Paris, Joss, un ancien marin, a choisi un drôle de métier en se réinventant crieur public. Tous les jours, il déclame sur sa place des messages que des inconnus lui déposent dans son urne. Déclarations d'amour, petites annonces et, depuis quelques temps, de mystérieux messages écrits en ancien français et annonçant l'arrivée de la peste. Folie douce d'un illuminé ? Le commissaire Adamsberg en doute lorsque, parallèlement à ces mystérieux messages, des signes étranges apparaissent sur les portes des immeubles de la capitale tandis que des cadavres sans aucun lien apparent entre eux mais tous étranglés et recouverts de charbons de bois sont retrouvés...

Après réflexion peut-être était-ce tout le tapage qu'il y avait eu à l'époque autour de Pars vite et reviens tard qui m'avait agacée car, en relisant le roman, je l'ai plutôt apprécié d'autant plus que j'avais oublié l'intrigue je l'avoue. Fred Vargas a un style propre à elle et qui peut agacer parfois : les vieux taciturnes, les ex taulards réglos malgré tout, les femmes volubiles... Même le commissaire Adamsberg peut paraître lassant avec son éternelle nonchalance. Malgré tout, le lecteur se laisse encore un fois happer par une intrigue qui joue habilement avec l'histoire, mêlant anecdotes véridiques et croyances populaires, et qui surprend avec un dénouement inattendu et un final mi-figue mi-raisin. Après cela, vous ne regarderez plus jamais les puces et les rats de la même façon...

 

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31 mars 2016 4 31 /03 /mars /2016 12:56

L02.jpgLes gouffres de la Lune

Arthur C. Clarke

éditions Milady

1961

 

 

Lorsqu'on évoque 2001 l'Odyssée de l'espace, tout le monde voit plus ou moins de quoi on parle, notamment grâce à l'adaptation cinématographique de Stanley Kubrick. Aujourd'hui c'est d'un autre ouvrage de SF de Arthur C.Clarke dont nous allons parler, moins connu certes, mais intéressant à plus d'un titre.

Nous sommes au XXIe siècle (oui je sais mais on ne ricane pas s'il vous plaît ou on reparle de 1984 d'Orwell) et la Lune a été colonisée. Désormais les touristes peuvent même se payer le luxe d'une croisière sur la mer de la Soif, une surface de poussière aux propriétés étonnantes. C'est le capitaine Pat Harris qui mène cette croisière à bord du Séléné et, jusqu'à présent il n'avait jamais eu de soucis, jusqu'au jour où un tremblement du sol entraîne l'engloutissement du vaisseau et le fait disparaître des radars. Livrés à eux-mêmes au milieu des poussières de la mer de la Soif, privés sous peu d'oxygène, Harris et ses passagers n'ont d'autre choix que d'espérer l'arrivée des secours avant qu'il ne soit trop tard...

C'est toujours un peu étrange de lire de la science-fiction à ses débuts, surtout lorsqu'on réalise qu'à l'époque de la publication des Gouffres de la lune, l'homme n'avait même pas encore posé le pied sur la dite Lune. Bien évidemment, de ce fait, certains éléments du livre sont complètement dépassés : il n'existe pas de mer de la Soif ou de tout autre surface de ce type sur la Lune et personne ne va (encore) y faire du tourisme. Reste que l'ouvrage est loin d'avoir aussi mal vieilli que la plupart des ouvrages du genre. Clarke en effet axe son récit autour de deux intrigues : l'une est centrée sur les secours et sur les moyens techniques mis en oeuvre pour évacuer le Séléné, l'autre s'intéresse au capitaine et à ses passagers prisonniers à bord : par ce choix de narration alternée, l'auteur crée une dynamique au roman. Il évite également sagement toute invention futuriste trop loufoque, préférant se concentrer sur des notions de science acquises et restant toujours plus ou moins dans le domaine du plausible. Les gouffres de la Lune, loin des grands espaces, est donc un livre huis-clos, dans ou à proximité de la mer de la Soif, qui confronte le lecteur à ses propres questionnements : peut-on prétendre maîtriser une planète alors que nous ignorons qui est vraiment le passager en face de nous ? Peut-on coloniser la Lune alors que certaines de ses propriétés sont inconnues ? Plus qu'un livre de science-fiction, les gouffres de la Lune est un appel à la prudence, un ouvrage plein d'humilité et de fascination à la fois devant un univers qui commence seulement à se dévoiler.

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29 mars 2016 2 29 /03 /mars /2016 15:50

L01.jpgHector et les pétrifieurs de temps

Danny Wallace

éditions Gallimard Jeunesse

2015

 

Il est très difficile d'écrire pour les adolescents mais encore plus à mon sens pour les pré-ados, âge délicat s'il en est. Aussi, je suis plus qu'admirative devant des auteurs comme Danny Wallace qui y parviennent sans efforts.

Hector vit dans une petite ville d'Angleterre où il ne se passe jamais rien, mais tellement rien que cette ville, Starkley, a été élue la quatrième ville la plus ennuyeuse du pays (si elle avait été sur le podium elle serait devenue intéressante mais non). Aussi, lorsque le monde se pétrifie autour de lui à intervalles réguliers, Hector est plutôt ravi de cet événement qui brise un peu la monotonie de sa vie. Car ce ne sont plus seulement les gens autour de lui qui se figent mais les animaux, le vent, et même le temps. Mais bientôt, il déchante lorsqu'il découvre que, durant ces "pauses", des monstres mystérieux en profitent pour envahir la ville et enlever des adultes...

Mélange habile d'humour et de fantastique, Hector et les pétrifieurs de temps est un récit plein d'imagination qui embarque son lecteur dans un style vivant et une intrigue bien construite. C'est drôle sans prendre l'enfant pour un idiot, ce qui n'empêche pas quelques moments plus graves (l'enlèvement des adultes) et d'autres plus touchants (Hector qui a du mal à accepter la disparition de son père ou qui découvre qu'Achille, la petite brute du collège, est loin d'être un méchant) Danny Wallace s'en donne également à coeur joie dans la descriptions des monstres pétrifieurs de temps pour apporter au livre le côté glaçant qui pourrait lui manquer. Que dire si ce n'est qu'Hector et les pétrifieurs de temps est une réussite à mettre entre toutes les mains des 10-12 ans et pourquoi pas au-delà...

 

 

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24 mars 2016 4 24 /03 /mars /2016 19:07

L01.jpgAmanda et les amis imaginaires

AF Harrold/ E Gravett

éditions du Seuil

2014

 

Amanda et Rudger, son meilleur ami, sont inséparables : à toute heure du jour et de la nuit, ils font les quatre cent coups ensemble même s'il faut avouer que c'est souvent Amanda qui mène la danse, Rudger se contentant de la suivre avec plus ou moins d'entrain. C'est une très jolie histoire d'amitié en tous cas mais qui a une petite particularité : c'est que Rudger est l'ami imaginaire d'Amanda et n'existe donc qu'à ses yeux. Or, lorsque Amanda a un accident, Rudger commence à s'estomper. Il a alors le choix : ou se trouver quelqu'un d'autre pour croire en lui, ou retrouver Amanda.

Il y a un peu du conte dans ce joli roman pour la jeunesse qui nous fait entrer de plein pied dans un univers coloré, un monde que l'auteur peuple de faux pirates et de vrais amis imaginaires, de méchants avaleurs de rêves, d'adultes un peu tristes et d'enfants un peu seuls. Tout se mêle avec grâce et si l'humour est toujours là, que ce soit dans le caractère fantasque d'Amanda ou dans le comportement extrême de la mère de Julia qui traîne sa fille chez le pédopsychiatre parce que celle-ci "voit" Rudger, la réflexion n'est jamais très loin non plus. En effet, Amanda et les amis imaginaires c'est un aussi un plaidoyer pour l'imagination, asphyxiée par des vies monotones et sans saveur, c'est également un très joli texte, parfois un brin mélancolique, sur la mort et l'oubli. Pas d'ellipses ni de complaisance, seulement une belle histoire servie par des illustrations qui donnent un côté très "old school" au roman et qui, pour ma part, m'a fait oublier le temps de ma lecture que j'avais passé l'âge de croire aux contes de fées.

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17 mars 2016 4 17 /03 /mars /2016 11:43

L01.jpgLes garçons ne tricotent pas (en public)

TS Easton

éditions Nathan

2014

 

Ben, seize ans, n'est pas un mauvais garçon. Certes, il a été surpris en train de voler de l'alcool dans un supermarché mais il a agi sous l'influence de ses débiles de copains. Lui-même ce qu'il aime c'est trier, classer et vivre une vie sans histoires, ce qui n'est pas évident entre une petite soeur pénible, une mère magicienne qui, lorsqu'elle n'est pas partie aux quatre coins du pays, fait jaillir des colombes un peu partout, et un père qui s'entête à le bassiner avec le sport et les voitures alors qu'il a horreur de ça... Malgré tout, Ben se voit flanqué d'un agent de probation et chargé de suivre un "parcours de réinsertion pour jeunes délinquants". Dans ce cadre il va devoir s'inscrire... à un cours de tricot et, oh surprise, découvrir qu'il adore ça et qu'il est vraiment très doué. Vive le point mousse et les pulls sans manches ! Le problème c'est que ce n'est guère une activité dont il peut se vanter auprès de ses copains, de son père ou encore de Megan, la fille dont il est amoureux...

A bien des égards, Les garçons ne tricotent pas (en public) m'a fait penser à la série Journal d'un dégonflé mais pour plus âgés. On y retrouve une narration sous forme de journal intime (c'est Ben qui raconte l'histoire) et un humour irrésistible tant dans le ton désabusé de l'adolescent que dans les situations improbables (j'ai beaucoup ri lors de ce passage où Ben, surpris par ses copains à lire en douce un magazine de tricot y glisse vite une revue porno pour faire illusion). L'ensemble reste bon enfant, l'auteur glissant ça et là quelques trouvailles assez drôles comme Joz, l'ami de Ben, qui s'essaie à la littérature en écrivant 50 nuances de Graham, plagiat à peine moins mauvais que 50 nuances de Grey, ou les parents du héros qui s'obstinent à faire des allusions graveleuses en sa présence. Si le thème "officiel" du livre reste avant tout l'histoire d'un ado qui se découvre une passion pour le tricot, il s'agit également du quotidien d'un garçon lambda qui n'est pas plus spécial qu'un autre mais qui ne partage pas les mêmes centres d'intérêt que ses camarades, c'est tout, et c'est avec beaucoup de finesse que Easton démonte des préjugés sans cependant en faire des tonnes. J'ignore si l'ouvrage rencontrera son public mais, pour ma part, j'ai apprécié son humour très "british" et ses descriptions qui me donnent presque envie de me mettre au tricot à mon tour.

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15 mars 2016 2 15 /03 /mars /2016 12:30

L07.jpgLittle Sister

Benoît Séverac

éditions Syros

2016

 

Il y a des sujets qui me semblent un peu délicats à aborder et qui nécessitent une certaine maîtrise de l'écriture et une bonne dose de subtilité. Toutes ces choses que Little Sister ne possède pas.

Pour prendre la défense de l'auteur, la thématique de l'histoire était plus que casse-gueule : Lena, seize ans, a vu sa vie bouleversée quatre ans auparavant lorsque son grand frère qu'elle idolâtrait a tout quitté, sans explications, pour partir faire le djihad en Syrie. Pour elle et pour ses parents c'est la stupeur et l'incompréhension. Cependant, alors que toute la famille a tiré un trait sur le jeune homme, Lena veut croire encore à une méprise. Aussi, lorsque Ivan, par l'intermédiaire de son ex meilleur ami Théo lui donne rendez-vous à Cadaquès, en Espagne, chez son oncle et sa tante, l'adolescente n'hésite pas une seconde.
A dire vrai, je ne savais pas trop à quoi m'attendre avec cet ouvrage. J'ignore même ce que j'espérais et s'il y avait une "bonne" façon de parler d'un sujet aussi sensible. Une chose est sûre en tous cas, ce n'est pas à la façon de Benoît Séverac. Si le début de la narration, abordée à travers les yeux de Léna, est touchant et soulève des interrogations délicates, le reste de l'histoire vire à la mauvaise course-poursuite et à des considérations politiques qui vont de la simplification outrancière aux raccourcis grotesques. De la subtilité ? Quelle drôle d'idée ! Réfugions-nous plutôt dans une dichotomie bons/ méchants, dans une intrigue mal menée de bout en bout avec un final qui tourne en eau de boudin et deux trois clichés moralisateurs par dessus. Peut-être que l'auteur était comme moi certes, peut-être qu'il ignorait comment parler du terrorisme ou du djihad. Dans ces cas-là cependant il me semble que le silence est préférable à ce roman désastreux qui élude les vraies questions (peut-on oui ou non pardonner à ceux que vous aimez même s'ils commettent les pires horreurs ? Pourquoi Ivan est-il parti ?) pour se contenter d'une action fade et bien-pensante qui n'incitera sûrement pas à une réflexion constructive.

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13 mars 2016 7 13 /03 /mars /2016 12:32

L02.jpgLe jeu du Maître

James Dashner

éditions Pocket Jeunesse

2013

 

Je suis souvent raillée pour une manie, celle de lire les livres d'un bout à l'autre, alors même que le début m'ennuie profondément. J'estime en effet qu'on ne peut juger un roman avec équité sans l'avoir terminé et que même le plus terrible nanar peut réserver de jolies passages. Bon, il faut avouer que 90% du temps ma première impression est la bonne et que le livre reste mauvais d'un bout à l'autre. Mais il y a parfois de bonnes surprises, ce qui est le cas pour le livre pour ados dont nous allons parler aujourd'hui.

L'auteur de Labyrinthe, James Dashner, revient avec une nouvelle série dont l'action se passe dans un futur lointain. Michael, le héros, est un jeune garçon comme tous les autres et, comme tous les autres, il passe le plus clair de son temps dans la réalité virtuelle, sur le VirtNet, à jouer à des jeux vidéos, à faire des quêtes ou simplement converser avec ses deux meilleurs amis, Sarah et Bryson, des personnes qu'il n'a par ailleurs jamais vu "en vrai". Tout change le jour où une série de suicides, bien réels, interviennent dans le cadre du jeu : Michael et ses amis, tous trois hackers doués, sont contactés par une agence pour enquêter sur ces meurtres déguisés et mettre fin aux agissements d'un dangereux cyber-terroriste.

C'était terriblement mal parti : les cent premières pages du livre sont d'un ennui sans nom; rythme lent, personnages sans saveur, intrigue grossièrement mise en place... Il est très rare de louper à ce point le début d'un roman mais James Dashner y parvient avec brio, plongeant son lecteur dans une douce torpeur. Pour ma part je n'y croyais plus mais, dès le moment où Michael et son gang s'enfoncent dans la réalité virtuelle, merveille, le récit s'accélère, le suspens s'intensifie et les scènes se font plus crues, plus violentes, réservant même parfois des moments d'horreur pure, jusqu'à un final intense et surprenant. Très honnêtement, c'est la première fois que je vois un livre démarrer si mal et se rattraper autant. Dashner, très peu à l'aise dans la mise en place de l'histoire ou de la psychologie de ses personnages, excelle en revanche dans les huis-clos et les descriptions glaçantes. C'est assez déconcertant et je laisse aux futurs lecteurs le soin de juger un roman qui, pour ma part, me laisse un peu perplexe mais me donne envie malgré tout de savoir la suite.

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8 mars 2016 2 08 /03 /mars /2016 15:23

L01.jpgLe petit coeur brisé

Moka

Ecole des Loisirs

2001

 

On retourne parler d'un livre de l'Ecole des Loisirs mais, oh merveille! celui-là je vais pouvoir vous en parler avec un peu plus d'enthousiasme que les précédents.

Mélaine a onze ans et sa grand-mère, celle qui l'élevait depuis la mort de ses parents dans un accident de voiture, vient de mourir à son tour. La petite fille n'est guère affligée car Clarisse d'Avillon-Faucher n'était guère tendre ni présente pour elle. Tout ce qu'il lui reste désormais de cette aïeule énigmatique, c'est son immense fortune et un mystérieux pendentif en forme de coeur, à moitié cassé. Recueillie par deux vieilles cousines excentriques qui, contrairement à tous, ne la traitent pas comme un panier de linge sale, Mélaine apprend enfin ce que c'est que d'avoir une famille et décide alors en regardant les albums photos d'en savoir un peu plus sur l'histoire de sa grand-mère.

C'est joli et c'est drôle. Le petit coeur brisé raconte avec légèreté le poids des secrets de famille et l'histoire d'une petite fille qui apprend à vivre et à s'épanouir tout en découvrant qui elle est et d'où elle vient. J'aime la façon dont Moka écrit, sans pompe et sans pathos, avec un humour discret qui n'empêche pas bon nombre de scènes touchantes. La seule chose que je déplore dans ce roman c'est l'ajout à mon sens superflu d'une intrigue policière qui ne présente aucun intérêt majeur. L'histoire déjà très bien aurait gagné à être plus simple et à se focaliser uniquement sur le secret de famille et sur la relation de Mélaine avec ses tutrices. Ceci dit, Le petit coeur brisé m'a beaucoup touchée et reste malgré la date de sa première parution (2001) d'une fraîcheur et d'une actualité étonnante.

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